La technique des empreintes digitales ou méthode vuceticienne
La technique des « empreintes digitales», ou méthode dactyloscopique, a été inventé par le criminologue croate Ivan Vucetic (1858-1925), d’où l’utilisation du terme de méthode « vuceticienne », toujours employé dans la police.
L’extrémité de chaque doigt a un dessin unique, formé par des coussinets légèrement gonflé et entrecoupé de lignes en relief : « les crêtes papillaires » espacées entre elles d’environs un millimètre. Quelques semaines après la fécondation, au stade de la vie intra-utérine, ces lignes adoptent chez le fœtus leur morphologie finale. Le dessin est alors immuable jusqu’à notre putréfaction.
La probabilité d’en trouver deux semblables, selon les calculs de Francis Galton (cousin de Darwin) effectué en 1892 est infime : une chance sur 64 milliards même chez les jumeaux homozygotes (les vrais jumeaux).
L'histoire des empreintes digitales
Bien que les empreintes de mains laissées par nos ancêtres sur les parois des cavernes, ne nous aient pas livré tous leurs secrets, l’empreinte du pouce servait déjà de signature lors d’échanges commerciaux à Babylone (-3000 av. JC) et dans la chine antique (7ème siècle).
Historiquement Nehemiah Crew, morphologiste anglais est le premier à décrire et à publier les crêtes papillaires (ou dermatoglyphes) dans ses « Philosophical Transactions » en 1984.
Au début du 19ème siècle, Jan Evangelista Purkinje, physiologiste tchèque, classe les crêtes papillaires en 9 catégories.
En 1858, William James Herschel, magistrat anglais en poste au Bengale, à l’idée de faire contresigner aux indigènes des contrats en leur demandant d’apposer leur empreinte digitale au dessous de leur signature.
Ce procédé sera utilisé à partir de 1877 dans l’administration pénitentiaire pour l’identification des détenus.
A la même époque, Le Docteur Henry Faulds, chirurgien dans un hôpital de Tokyo s’intéresse aux traces de doigts moulées sur des vieilles poteries exhumées de la baie de Yedo au Japon. il envoie un courrier à Darwin dans lequel il explique que les empreintes digitales sont un moyen idéal pour l’identification des récidivistes, des cadavres inconnus et des auteurs d’un délit. Il expose ses vues dans la revue « Nature » le 28 octobre 1880. Date butoir, puisque c’est la naissance de l’utilisation des empreintes digitales dans l’investigation criminelle.
Les empreintes digitales en criminologie
En 1902, la police parisienne réalisait une première mondiale en démasquant un criminel au moyen de ses seules empreintes digitales : Henri-Léon Scheffer
Le 16 octobre 1902 dans l’appartement d’un dentiste de la rue du Faubourg Saint-Honoré à Paris, on découvre le corps de Joseph Reibel, 45 ans, au service du Dr Auguste Alaux. Le vol semble à l’origine du meurtre puisque de l’argent aurait disparus ainsi que divers objets de valeur. L’autopsie confirme que la victime a été asphyxiée par strangulation entre cinq et six heures du soir. Rien de plus. Le Figaro titre « Sur l’auteur du crime, aucun indice ; contre personne, nul soupçon ».
Tout le monde pensait que le dossier demeurerait au stade d’énigme…
Pourtant sur le carreau d’une vitrine brisé, quatre marque de pouce qu’Alphonse Bertillon, chef du Service de l’identité judiciaire, photographie et identifie comme étant celles d’un certain Henri-Léon Scheffer, né en 1876, arrêté et fiché quelques mois plus tôt.
Dans un rapport au juge d’instruction daté du 24 octobre, il démontre la similitude des empreintes et explique que leur disposition prouve qu’elles ont été faites après le bris de la vitrine.
C’est la première fois qu’un assassin est identifié, convaincu de meurtre et condamné à l’aide de ses empreintes : » les seuls dénonciateurs qui ne trompent ni ne mentent jamais « .
Inventeur de l’anthropométrie, Alphonse Bertillon est à l’origine d’une « science criminelle » qui parut suffisamment riche de promesses à ses contemporains pour qu’ils le placent, aux côtés de Pasteur, au rang des savants d’exception que la France avait donnés au monde.
La méthode d’anthropométrie consiste à établir des fiches signalétiques sur lesquelles figurent une double photo face-profil de chaque criminel, la mesure des caractéristiques stables de son corps : sa bouche, son crâne, son nez, ses oreilles… la couleur et la forme. De quoi permettre aux services de police d’établir des portraits fiables facilement répertoriable.
Les empreintes digitales et l'informatique : une vraie révolution
Adopté par les polices du monde entier, les empreintes digitales sont une des clés de l’investigation criminelle.
En France, les fiches qui dataient d’un siècle, ont été peu à peu informatisées grâce au FAED (Fichier Automatique des Empreintes Digitales), mis en place en 1982 par le ministère de l’Intérieur.
Depuis 1990, ce fichier national est complètement opérationnel. Actuellement se sont à peu près un millions cinq cent mille empreintes qui y sont enregistrées, tous né après 1960 et ayant fait l’objet de poursuite pénales, et cent trente mille traces qui attendent d’être confondues.
A chaque ajout d’empreinte, l’ordinateur compare la trace à celle qu’il a en mémoire et affiche les résultats.
En quelques minutes l’ordinateur compare la trace avec des milliers d’empreintes, une prouesse qui serait impossible manuellement en raison d’une perte de temps trop importante.
Pour avoir une valeur juridique les empreintes doivent avoir 12 points de concordance (16 en Angleterre, entre 8 et 12 en Allemagne ) et surtout aucun point de dissemblance.
Les procédés pour relever les empreintes digitales
En un siècle le procédé permettant de relever des empreintes sur le lieu du crime n’a guère évolué.
Les dactylo-techniciens, spécialiste des relevés d’empreintes digitales, n’ont d’autre outils que de la poudre et un pinceau.
Le système est resté le même, mais la gamme de poudres s’est étendue :
– poudre blanche à base d’aluminium pour les surfaces lisses et sèches ( le bois, le verre…)
– poudre noire pour des surfaces blanches
– poudre fluorescente pour des fonds multicolore
Empreintes digitales : comment ça marche ?
Le produit se fixe aux micro-gouttelettes d’eau, de graisse, d’acides aminés caractéristiques de la sueur que laissent les pores de la peau. Presque tous les supports peuvent être analysé par ce moyen. Mais pendant longtemps le papier et les tissus posaient problème.
Deux outils technologiques permettant d’aller encore plus loin dans l’investigation.
Le « Crimescope », laser lumineux qui émet des longueurs d’ondes allant de l’infrarouge à l’ultraviolet, permet d’éclairer tout à la fois les traces digitales, les fibres, les poils et de minuscules résidus biologiques.
Le procédé de métallisation sous vide permet de faire apparaître des traces sur un objet placé dans un caisson sous vide et vaporisé d’or pur et de zinc; les métaux passent à l’état de vapeur, l’or se dépose sur l’objet tandis que le zinc va se placer entre les crêtes papillaires. Le procédé est bien sûr très coûteux donc rarement utilisé.
A l'empreinte digitale s'ajoute l'empreinte génétique
L’ADN constitue en effet une seconde signature permettant à l’investigation criminelle d’avancer.
Qu'est-ce que l'ADN ?
L’ADN (Acide DésoxiriboNucléique) est la molécule porteuse de l’information génétique. Elle se compose de deux brins qui s’enroulent l’un sur l’autre à la manière d’une torsade. Il est exactement le même dans toutes les cellules de notre corps, mais il est unique à chaque individu (à l’exception des jumeaux identiques) permettant ainsi d’identifier, par comparaison, la source d’une substance biologique ou le lien de filiation entre des individus.
On peut utiliser principalement deux techniques pour établir l’empreinte génétique des individus.
C’est au milieu des années 1980 que l’identification génétique devenait possible grâce à la technologie dite RFLP (restriction fragment length polymorphysim). Puis au début des années 1990, une nouvelle voie s’ouvre pour l’identification génétique grâce à la technologie dite PCR (polymerase chain reaction).
La technologie PCR qui consiste à copier des milliers de fois une région d’intérêt dans l’ADN est extrêmement précise, rapide et ne requiert que de très petite quantité d’ADN, d’où ses avantages. Ainsi, la technique PCR offre des réponses claires même si le seul élément d’analyse disponible est un cheveu ou un mégot de cigarette.
Quelle soit digitale ou génétique l’empreinte est de plus en plus sollicité en criminologie.
Les fichiers informatiques s’étoffent, les pays communiquent entre eux, mais l’empreinte présente encore des failles.
Son seul inconvénient c’est qu’elle utilise la méthode de comparaison, ce qui induit qu’il faut au préalable avoir en mémoire l’empreinte correspondante, d’où un échec de la méthode lorsque l’individu recherché n’est pas encore fiché par les services de polices… Seul des récidivistes peuvent être confondus rapidement par l’ordinateur, ce qui déjà en soit est extraordinaire.
La solution serait d’imposé un relevé d’empreinte à la naissance, mais comment faire quand même les naissances ne sont pas toutes déclarées…?