Le film documentaire « La marche de l’empereur » rencontre un vif succès aux Etats Unis et remporte l’Oscar de meilleur film étranger mais curieusement la bande son est remplacée…. mais qu’importe, Emilie Simon travaille déjà sur son second album « Végétal » qui est sortit le 6 mars 2006 dans les bacs.
Lorsqu’elle a entamé le chantier de son nouvel album « Végétal », avant même son épopée glaciaire sur l’Antarctique, les premières chansons qui ont naturellement bourgeonné dans son imagination fertile possédaient des traits communs : noms de fleurs, apprivoisées ou sauvages, de plantes carnivores, grimpantes ou flottantes, d’arbres fantomatiques… Lotus, narcisse, muguet, roseaux, peuplier ou roses hybrides de thé, autant de créatures végétales dont il ne restait plus qu’à animer les mouvements en leur attribuant des formes et des psychés humaines. Ainsi naquit « Alicia », personnage mi-fille mi-fleur, qui nous attire d’emblée à l’intérieur de ce disque en refermant derrière elle ses longs bras de lierre. Bienvenu dans ce piège délicieux, le temps d’un songe musical de cinquante minutes totalement déraciné des réalités terrestres, suspendu à sa propre horloge, irrigué par une sève intrigante, dégageant des parfums inédits et terminant comme il avait débuté : « en cendres ». Beautés saisonnières, romances éphémères, chassés-croisés sur un lac, d’une chanson l’autre se tisse la trame d’un récit tour à tour évanescent et tumultueux, panthéiste et surréaliste, contemplatif et fugace.
Pour donner corps à sa rêverie botanique, Emilie Simon a provoqué de nouvelles greffes sur son habituel terreau d’instruments électroniques, faisant notamment appel à des musiciens de la sphère Contemporaine (flûtiste, percussionniste), en plus de la basse de Simon Edwards (Talk Talk, Beth Gibbons, Alain Bashung) qui évoque à elle seule les modulations langoureuses du cycle des saisons. Quant au fidèle Marcus Dravs, il a comme sur chaque projet d’Emilie apporté sa touche méticuleuse lors du mixage. Si le premier album avait cette tendance, bien naturelle pour un baptême, de papillonner entre plusieurs registres, la voix acidulée d’Emilie se chargeant de faire le lien, le nouveau se révèle plus cohérent, concentré autour de quelques idées fortes. On y remarquera un son général plus boisé, plus organique, propre à la nature même de son thème. Les cordes s’y font ainsi davantage intimistes, plus proches de l’écorce électronique des rythmiques, contribuant ainsi à une impression générale de calfeutrage.
L’obsession initiale d’Emilie à vouloir conjuguer les sons environnants, par essence sauvages, avec la discipline qu’impose la chanson pop trouve ici encore quelques évidentes illustrations. Sans méthode prédéfinie, se laissant gouverner par l’intuition, son mode d’écriture et sa conception empirique des arrangements s’apparentent de plus en plus à un travail plastique, la mélodie et le texte formant ce socle immuable qui l’autorise à prendre d’autant plus de liberté avec la musique. Qu’on ne s’y trompe pas, tout cela demeure néanmoins léger et aérien, malgré la complexité apparente du processus. Loin de se laisser engourdir non plus par la mélancolie de son sujet, Végétal est un album vivifiant.